Livestock Research for Rural Development 31 (8) 2019 Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

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Facteurs affectant la réussite du transfert embryonnaire chez des brebis Ouled Djellal et Hamra

Ismail Gharbi, Amina Samia Dechicha, Mustapha Ferrouk, Djamila Baazize-Ammi, Seddik Kebbal et Djamel Guetarni1

Institute of Veterinary Sciences, University of Blida 1, BP 270 - 09000, Algeria.
ism_guarb@yahoo.fr
1 Faculty of Sciences of Nature and Life, University of Blida 1, BP 270 - 09000, Algeria.

Résumé

La transplantation embryonnaire ovine permet de multiplier la descendance de femelles à haut potentiel génétique et de conserver des races en danger d’extinction. L’objectif de l’étude a été d’évaluer l’effet de certains facteurs liés à l’embryon ou la receveuse sur la réussite du transfert embryonnaire chez 14 brebis de race Hamra (H) et 15 Ouled Djellal (OD). Pour cela 154 embryons de race H ou OD (frais: n =80 dont 40 H et 40 OD, congelés: n=74 dont 36 H et 38 OD), et quarante brebis receveuses (n=40) croisées ont été utilisés. Les brebis receveuses ont été synchronisées par la pose d’éponges vaginales imprégnées avec 40 mg d’acétate de fluorogestone (FGA). Les embryons ont été transférés par la méthode semi-laparoscopique 7 jour après l’œstrus. Les taux de mise bas (MB) et de survie embryonnaire (SE) après transfert d’embryons frais (n = 80) ont été plus élevés que ceux obtenus avec des embryons congelés (n = 74): MB (embryons frais: 67,5% vs congelés: 27%, p<0,001), SE (embryons frais: 53,7% vs congelés: 24,3%, p<0,001). Aucune différence significative n’a été observée entre les deux génotypes d’embryons (H, n = 40 et OD, n = 40) pour les taux de MB (H: 60% vs OD: 75%, p>0,05); et de SE (H: 52,5% vs OD: 55%, p>0,05). En revanche, le taux de SE après transfert de morulas (n = 30) a été plus faible que celui obtenu avec le stade blastocyste (n = 50) (40% vs 62%, p<0,05). Les receveuses ayant un nombre d’ovulations ≥ 2 (n = 18) ont eu des taux de MB et SE plus élevés que celles qui ont eu une seule ovulation (n = 22) [MB (94,4% vs 45,4%, p<0,001); SE (75% vs 36,7%, p<0,001)]. Ainsi, le transfert d’embryons frais et congelés par la méthode semi-laparoscopique est réalisable dans nos conditions locales.

Mots clés: Algérie, embryon, ovin, race locale, survie, transfert


Factors affecting the success of embryo transfer in Ouled Djellal and Hamra ewes

Abstract

Ovine embryonic transplantation allows to multiply the offspring of females with high genetic potential and to preserve breeds in danger of extinction. The objective of the study was to evaluate the effect of certain embryo or recipient factors on the success of embryonic transfer in 14 ewes of the Hamra (H) and 15 Ouled Djellal (OD) breeds. For that 154 H or OD embryos (fresh: n=80 of which 40 H and 40 OD, frozen: n=74 of which 36 H and 38 OD), and forty sheep (n=40) cross-breed recipients were used in this study. The receiving ewes were synchronized by the insertion of vaginal sponges impregnated with 40 mg fluorogestone acetate (FGA). The embryos were transferred by the semi-laparoscopic method 7 days after estrus. Rates of lambing (L) and embryonic survival (ES) after transfer of fresh embryos (n = 80) were higher than those obtained with frozen embryos (n = 74) [L (fresh: 67,5% vs frozen: 27%, p<0.001); ES (fresh: 53,7% vs frozen: 24,3%, p<0.001)]. No difference was observed between the two embryos genotypes (H, n = 40 and OD, n = 40) for the rates of L (60% vs 75%, p>0,05); and ES (52,5% vs 55%, p>0,05). On the other hand, the ES rate after transfer of morulas stage (n = 30) was lower than that obtained with blastocyst stage embryos (n = 50) (40% vs 62%, p<0,05). Recipients with a number of ovulations ≥2 (n = 18) had higher rates of L and ES than those who had a single ovulation (n = 22) [L (94,4% vs 45,4%, p<0.001); ES (75% vs 36,7%, p<0,001)]. So, the transfer of fresh and frozen embryos by semi-laparoscopic method is feasible under our local conditions.

Keywords: Algeria, embryo, local breed, sheep, survival, transfer


Introduction

En Algérie, la race Ouled Djellal (OD) a connu une forte progression des produits de croisement avec les autres types de populations ovines, situation qui favoriserait la disparition du standard phénotypique de la race et son potentiel génétique. En revanche, le risque de disparition de la race Hamra (H) serait dû à la productivité numérique moyenne et la faible productivité pondérale par rapport aux autres races locales (Djaout et al 2017).

Chez les petits ruminants, la production et le transfert d’embryons permettent de multiplier la descendance des femelles à haut potentiel génétique et de conserver des races en danger d’extinction (Baril et Guignot 2010). De plus, la cryoconservation des embryons constitue une étape essentielle, car elle permet la création de banques d’embryons et facilite la mise en œuvre sur le terrain de la transplantation embryonnaire (Guignot 2005).

Les résultats de la transplantation embryonnaire sont influencés usuellement par la variabilité de la réponse superovulatoire, du taux de fécondation et de survie des embryons transférés (Baril et Guignot 2010). Des facteurs spécifiques aux embryons ainsi qu’aux receveuses ont été aussi suggérés d’affecter la survie d’embryons chez le bovin, la chèvre et la brebis. En effet, le nombre et la qualité des embryons, le nombre de corps jaunes, l’âge et la parité des receveuses semblent avoir un effet sur la réussite du transfert embryonnaire (Bari et al 2003; Baril et Guignot 2010; Gimenez Diaz 2012).

La qualité de l’embryon est essentielle pour la réussite du transfert; en effet, la survie d’embryons ne présentant aucune anomalie visible semble être supérieure à celle d’embryons de moindre qualité (Sakul et al 1993). De même, les taux de survie les plus élevés ont été observés lors de transfert d’embryons au stade de blastocyste par rapport à ceux de morula (Alabart et al 1995; Bari et al 2003). Selon Baril et Guignot (2010), l’augmentation du taux de survie embryonnaire est liée à la présence au moment du transfert d’un nombre élevé de corps jaunes. Puisqu'il y a là l'évidence qu’il existe une variation considérable de la sécrétion de progestérone lors des gestations successives chez les ovins, il est possible que l'âge et la parité de brebis des receveuses puissent aussi affecter la survie d'embryon (Bari et al 2003).

A notre connaissance, aucun essai de transfert d’embryons n’a concerné à ce jour les races locales algériennes. L’objectif de la présente étude a été d’évaluer l’effet de certains facteurs liés à l’embryon et à la receveuse sur la réussite du transfert embryonnaire chez des brebis de races Hamra et Ouled Djellal.


Matériel et méthodes

Cadre de l’expérimentation

Les essais de production et de transfert d’embryons ont été menés au niveau de la station d’expérimentation de l'université Saad Dahleb de Blida 1 (36° 28'N de latitude et 2° 49'E de longitude), durant la saison de reproduction (septembre à novembre). En effet, bien que les races locales soient capables de se reproduire toute l’année, les performances de reproduction sont meilleures pendant la saison de reproduction. Cent cinquante-quatre embryons produits in vivo chez 29 brebis donneuses (14 Hamra et 15 Ouled Djellal; (frais: n =80 dont 40 de H et 40 de OD, congelés: n=74 dont 36 de H et 38 de OD), ont été utilisés dans ces expérimentations. Quarante brebis receveuses (n=40) de race croisée (Rembi x Ouled Djellal, n >2) ont servi pour le transfert d’embryons frais (2 embryons par receveuse) puis congelés à 12 mois d’intervalle. Les brebis âgées de 1 à 6 ans et présentant un poids vif variant entre 27 et 68 kg ont été gardées sous éclairage naturel dans la bergerie de la station expérimentale. Huit béliers (n=8, 3 OD et 5C) âgés de 3 à 7 ans et d’un poids vif variant entre 52 et 78 kg ont été utilisés pour la détection des chaleurs. Un déparasitage au moyen de l’albendazole (Valbazen 1,9 %®) et d’ivermectine (Ivomec®) a été appliqué alternativement chez tous les animaux sélectionnés suivant le rythme classique de traitement antiparasitaire en fonction des différentes saisons de l'année. L’eau de boisson était distribuée ad libitum et le foin à volonté avec une supplémentation journalière de 500g de concentré /animal.

Traitement hormonal de synchronisation de l'œstrus et de superovulation

La synchronisation de l’œstrus a été obtenue par insertion par voie vaginale d’éponges imprégnées de 40 mg d’Acétate de Fluorogestone (FGA) (Chronogest, Intervet, France) durant 13,5 et 14 jours chez les brebis receveuses et donneuses respectivement.La superovulation des donneuses a été induite par l’administration successive de 16 ou 20 unités Armour (UA) de pFSH purifiée (Stimufol, Reprobiol, Université de Liège, Belgique) selon le protocole hormonal décrit par Gharbi et al (2018).

L’induction de l’œstrus chez les receveuses a été obtenue par l'administration, par voie intramusculaire, d’une dose de 500 UI d’eCG (figure 1).

Figure 1. Protocole de traitement de synchronisation et d’induction de l’œstrus des brebis receveuses d’embryons (race croisée)
Détection de l'œstrus

La détection de l’œstrus a été réalisée à l’aide de béliers entiers munis d’un tablier toutes les quatre heures, depuis la 12è heure après le retrait de l'éponge vaginale jusqu’à la disparition des signes de l’œstrus (96è heure). Toute brebis (donneuse ou receveuse) restant immobile, lors du chevauchement par le bélier détecteur, a été considérée en chaleur.

Saillie, évaluation de la réponse ovarienne, récolte, recherche et classification des embryons

Une description détaillée de ces différentes étapes a été rapportée dans notre précédente étude (Gharbi et al 2018). Brièvement, la fécondation des brebis donneuses par une double saillie en main a été réalisée, à 32 et 44 heures après le retrait de l’éponge vaginale avec des béliers reproducteurs. La réponse ovarienne a été évaluée, sous laparoscopie 7 jour après le début de l'œstrus, par dénombrement des corps jaunes, et les embryons ont été récoltés par laparotomie médioventrale (Baril et al 1993). La recherche et le classement des embryons ont été réalisés selon les critères morphologiques de l’International Embryo Transfer Society (IETS: Robertson et Nelson 1999).

Conditionnement et transfert d’embryons

Les embryons destinés au transfert en frais ont été lavés dans le milieu de conservation (tampon phosphate «F1» à 4‰ de BSA, IMV Technologies, l’Aigle, France), puis conditionnés par paire dans une pipette en verre reliée à une seringue à insuline. Les embryons destinés à la congélation ont été placés dans de l’éthylène glycol (1,5 M, IMV Technologies, l’Aigle, France) pour une durée de 5 à 6 minutes puis associés par paire et mis sous paillettes de Cassou (0.25 ml) transparentes. Les paillettes ainsi préparées et scellées par un jonc d'identification stérile ont été soumises à la congélation lente au moyen d’un bio-congélateur programmable selon la méthode décrite par Palasez et Mapletoft (1996) et par Guinot (2005).

Après évaluation laparoscopique des ovaires, une incision de 2 à 3 cm au niveau de la ligne blanche a été pratiquée pour extraire de l’abdomen l'extrémité de la corne utérine ipsilatérale du corps jaune, à l’aide d’un forceps. Par la suite, une ponction de cette dernière a été réalisée à l’aide d’une aiguille de calibre 18, permettant ainsi l'insertion de l’extrémité de la pipette en verre afin d’injecter deux embryons. Une fois les deux embryons injectés, la corne utérine a été remise dans la cavité abdominale et la paroi abdominale et la peau ont été suturées. La peau a été désinfectée et recouverte d’un pansement.

Diagnostic de gestation

Deux examens échographiques (transrectal et trans-abdominal) ont été effectués 35 et 45 jours après le transfert d’embryons, en utilisant un échographe de type Pie Médical 100 muni d’une sonde linéaire bifréquence 6 / 8 Mhz.

Paramètres évalués et analyses statistiques

Les paramètres suivants ont été évalués: le pourcentage de brebis en œstrus (nombre [nb.] de brebis détectées en œstrus / nb. total de brebis traitées x 100), le pourcentage de mise bas (nb. de brebis ayant mis bas / nb. total de brebis receveuses d’embryons x 100), le pourcentage de survie embryonnaire (nb. d’agneaux nés / nb. d’embryons transférés x 100).

Les données relatives à l’effet des facteurs liés à l’embryon et la receveuse sur les taux de mises bas et de survies embryonnaires ont été analysées en utilisant le test du chi carré. En raison des faibles résultats obtenus avec le transfert d’embryons congelés, l’évaluation de l’effet des variables génotype, stade de développement de l’embryon; parité, âge et nombre d’ovulations n’a concerné que les données relatives au transfert d’embryons frais. Le logiciel Systat (version 10) a été utilisé pour toutes les analyses statistiques (niveau de signification p< 0,05).


Résultats

Facteurs liés à l’embryon
Effet du type d’embryon (80 frais, 74 congelés) sur le taux de réussite du transfert embryonnaire

Les résultats relatifs au pourcentage de brebis détectées en œstrus, de mise bas et de survie embryonnaire sont présentés dans le Tableau 1. Le taux de brebis détectées en œstrus tend à être plus élevé pour le transfert d’embryons frais que pour le transfert d’embryons congelés (100%vs 92,5%, p=0,07). De même, les taux de MB et SE lors de transfert d’embryons frais ont été significativement plus élevés que ceux obtenus avec des embryons congelés [MB (embryons frais: 67,5% vs congelés: 27,0%, p=0,001);SE (embryon frais: 53,7% vs congelés: 24,3%, p<0,001)].

Tableau 1. Effet du type d’embryons (frais, congelés) sur le taux de réussite du transfert embryonnaire
Variables Type d’embryon p
Frais Congelé
Nombre de brebis traitées 40 40 -
Nombre d’embryons transférés 80 74 -
Taux de brebis en œstrus (%) 100 (40/40) 92,5 (37/40) 0,07
Taux de mise bas (%) 67,5 (27/40)a 27,0 (10/37)b <0,001
Taux de survie embryonnaire (%) 53,7 (43/80)a 24,3 (18/74)b <0,001
Les valeurs présentant sur une même ligne des lettres différentes en exposant sont significativement
différentes (a vs b, p< 0,001)
Effet du génotype et du stade de développement de l’embryon sur le taux de réussite du transfert embryonnaire

Les résultats relatifs aux taux de MB et SE en fonction du génotype et du stade de développement de l’embryon sont rapportés dans le Tableau 2. Aucune différence n’a été observée entre les deux races pour les taux de MB (60,0% vs 75,0%, p=0,31) et SE (52,5% vs 55,0%, p=0,82). En revanche, le taux de SE après transfert d’embryons au stade morula a été plus faible que celui obtenu avec le stade blastocyste (40,0% vs 62,0%, p=0,05).

Tableau 2. Effet du génotype et du stade de développement de l’embryon frais sur le taux de réussite du transfert embryonnaire

Embryons

Embryons
transférés (n)

Receveuses
(n)

Mises bas

p

Survie embryonnaire

p

(n)

(%)

(n)

(%)

Génotype

Hamra

40

20

12

60,0

0,31

21

52,5

0,82

Ouled Djellal

40

20

15

75,0

22

55,0

Stade de développement

Morula

30

15

8

53,3

0,13

12

40,0a

0,05

Blastocyste

50

25

19

76,0

31

62,0 b

Les valeurs présentant sur une même colonne des lettres différentes en exposant sont différentes en p< 0,05

Facteurs liés à la receveuse d’embryon (parité, âge et nombre d’ovulations)

Les résultats comparés des taux de MB et SE en fonction de la parité, de l’âge, et du nombre d’ovulations de la receveuse sont rapportés dans le Tableau 3. Les taux de MB et SE ne différent pas significativement (p>0,05) en fonction de la parité, et de l’âge de la receveuse. Par contre, les receveuses ayant eu un nombre d’ovulations ≥ 2 ont eu des taux de MB et SE plus élevés par rapport à ceux des brebis ayant eu une seule ovulation [MB (94,4% vs 45,4%, p=0,001); SE (75,0% vs 36,7%, p=0,001)].

Tableau 3. Effet de la parité, l’âge et le nombre d’ovulations des receveuses sur le taux de réussite du transfert embryonnaire
Receveuses Embryons
transférés (n)
Mises bas p Survie embryonnaire p
(n) (%) (n) (%)
Parité
Multipares (n=26) 52 17 65,4 0,93 27 51,9 0,87
Nullipares (n=12) 24 08 66,7 12 50,0
Age
≤ 2ans (n=20) 40 14 70,0 0,73 21 52,5 0,82
> 2 ans (n=20) 40 13 65,0 22 55,0
Nombre d’ovulations
= 1 (n=22) 44 10 45,4a 0,001 16 36,7a 0,001
≥ 2 (n=18) 36 17 94,4b 27 75,0b
Les valeurs présentant sur une même colonne des lettres différentes en exposant sont significativement différentes (a vs b, p< 0,001)


Discussion

Les taux de mise bas (67,5%) et de survie embryonnaire obtenus (53,7%), lors de transfert d’embryons frais issus de race Hamra et Ouled Djellal, chez des brebis de race croisée, ont été très satisfaisants. Ces résultats sont comparables à ceux rapportés par Baril et al (2001) et Bettencourt et al (2009), mais considérablement plus faibles que ceux rapportés par Dattena et al (2000) et Papadopoulos et al (2001) qui varient de 80% à 90%.

En ce qui concerne les taux de survie embryonnaire et de mise bas obtenus lors du transfert d’embryons congelés significativement plus faibles par rapport à ceux du frais, nos résultats sont plus faibles par rapport à ceux rapportés par Ishida et al (1999), Bettencourt et al (2009), Baril et Guignot (2010) et Youngs (2011) qui varient de 40% à 75%. En effet, bien que la cryoconservation d'embryons soit une technique qui semble bien maitrisée, les taux de réussite après transfert d'embryons congelés restent toujours inférieurs (10 à 15%) par rapport à ceux d'embryons frais (Guignot et al 2005; Gimenez Diaz 2012). Toutefois, des taux moyens de survie de 50% à 60% ont été rapportés lors de transfert d'embryons congelés par différentes méthodes conventionnelles et avec une variété de cryoprotecteurs (Dattena et al 2004; Guignot et al 2009; Gimenez Diaz 2012). En effet, la sélection d'embryons pour le transfert d’embryons (frais ou congelés) est basée sur l'évaluation morphologique sous microscopie (Abe et al 2002). La subjectivité inhérente à cette sélection a été démontrée lors des études ultra-structurelles de blastocystes bovin (Vajta et al 2006), de morulas et de blastocystes ovin frais et congelés (Cocero et al 2002) qui montrent que certaines anomalies restent non détectables par la microscopie; ce qui pourrait être la cause de la faiblesse du taux de survie d’embryons congelés obtenu.

Il est à signaler que la perte de viabilité associée à la congélation peut aussi être influencée par le type, la concentration du cryoprotecteur utilisé et la méthode de congélation (Guignot et al 2005; Vajta et Kuwayama 2006). Dans notre cas, nous avons utilisé l’éthylène glycol du commerce à la concentration 1,5M et la méthode de congélation classique, les plus fréquemment utilisés sur le terrain pour la collecte et transfert d’embryons bovins, ovins et caprins produits in vivo comme rapporté par Guignot (2005). Comparativement aux autres méthodes de congélation, celle utilisée ici nécessite plus de temps car le cycle de refroidissement ne peut être lancé que lorsqu’un nombre suffisant d’embryons a été collecté impliquant un temps d’attente supplémentaire aux premiers embryons collectés devant être refroidis. La baisse du taux de survie de nos embryons après décongélation pourrait être conséquente au délai d’attente des embryons devant être congelés qui était en moyenne de 5h alors qu’il devrait ne pas dépasser 2 à 3 h (Baril et al 1993), d’une part et au temps d’exposition plus ou moins élevé des embryons au cryoprotecteur, d’autre part. En effet, l’exposition prolongée des embryons au cryoprotecteur au moment de la congélation peut affecter leur survie (Dobrinsky 2002) probablement à cause de la toxicité due à sa composition (Tsang et Chow 2012).

Nous avons obtenu des taux de mise bas et de survie embryonnaire plus élevés lors du transfert d’embryons de race OD par rapport à ceux de la race H. Des variations des taux de survie embryonnaire en relation avec le génotype de l’embryon ont été signalées dans la littérature. Selon Gimenez Diaz (2012), les taux de développement et de survie sont plus élevés pour les brebis de race croisée comparativement à ceux de race pure, d’une part et selon Bolet et al (1986), Hinch et al (1998), cette variation semble être associée à la présence des anomalies chromosomiques et de la différence des taux d’ovulation, d’autre part. Toutefois, il est à noter que la mortalité embryonnaire peut être conséquente aux variations de la qualité du sperme (Courot et Colas 1986) via la race, les différences entre les lignées de la même race et la prolificité (Hinch et al 1998).

La qualité et le stade de développement de l’embryon seraient une source de variation du taux de mise bas et de survie embryonnaire (Hasler 2001, Bari et al 2003 et Baril et Guignot 2010). Shirazi et al (2010) rapportent que les taux de gestation et de survie embryonnaire lors de transfert de blastocystes frais ou cryoconservés sont plus élevés que ceux de morulas. Selon Gimenez Diaz (2012), les récoltes d’embryons, réalisées fréquemment le 6ième ou 7ième jour après saillie, permettent l’obtention d’embryons à différents stades de développement à cause des différences des temps d'ovulation et/ou de fertilisation. Par conséquent, des morulas récoltés avec une cohorte de blastocystes pourraient présenter une détérioration ou un retard de développement qui augmenterait probablement leur sensibilité élevée au refroidissement (Cocero et al 1996; Garcia–Garcia et al 2005) et diminuerait donc leur survie après congélation (Garcia–Garcia et al 2005; Baril et Guignot 2010). Selon Garcia–Garcia et al (2005), l’augmentation du taux de survie après cryoconservation des blastocystes semble être liée au nombre plus élevé et à la taille réduite des cellules qui améliore la tolérance à la congélation comparativement aux embryons de stade morula qui ont un nombre moindre et de plus grandes cellules.

Dans la présente étude, les taux de survie embryonnaire obtenus chez les brebis nullipares jeunes et multipares adultes ont été similaires. Les travaux de Callesen et al (1995) et Bari et al (2003) rapportent peu ou pas de différence dans les taux de gestation et de survie embryonnaire des receveuses pour les espèces bovine et ovine tandis que ceux de Broadbent et al (1991) et Baril et Guignot (2010), rapportent une hausse significative chez les nullipares. La baisse du taux de survie chez les multipares pourrait s’expliquer par la présence d’une lactation en même temps que la gestation provoquant un stress nutritionnel potentiel, d’une part et de la présence d’un problème utérin résiduel d'une gestation précédente, d’autre part (Broadbent et al 1991).

Il a été observé un effet positif du nombre d’ovulations de la receveuse sur le taux de survie embryonnaire lors du transfert de deux embryons, avec un optimum pour deux ovulations et plus. Cette situation est similaire à celle rapportée par Alabart et al (1995), Baril et Guignot (2010); mais différente de celle rapportée par Scaramuzzi et Downing (1997), Bari et al (2003) et Gimenez Diaz (2012) lors de transfert d’un seul ou deux embryons. L’augmentation du taux de survie pourrait être attribuée aux niveaux plus élevé de progestérone du groupe de brebis ayant présenté deux ovulations et plus car des concentrations de progestérone soutenues par un corps jaune sont nécessaires pour la croissance, le développement et l'implantation d’embryons (D’Alessandro et Martemucci 2004). Il est à noter que des concentrations plasmatiques de progestérone sont corrélées positivement avec le taux d’ovulation (Chagas e Silvia et al 2003), d’une part et que des concentrations périphériques basses de progestérone pendant la première phase lutéale sont associées à de faibles taux de survie d'embryon chez le bovin (Diskin et Moris 2008), d’autre part; alors que des concentrations élevées de progestérone sont associées à des taux élevés de survie embryonnaire (D’Alessandro et Martemucci, 2004). De ce fait, Diskin et Moris (2008) suggèrent qu’un niveau minimal de progestérone plasmatique est exigé chez les receveuses de l’espèce bovine pour une meilleure survie des embryons. Selon Barnes (2000) et D’Alessandro et Martemucci (2004), l’utilisation d’un traitement progestatif supplémentaire au moment du transfert dans l’espèce ovine augmente les niveaux de progestérone circulants améliorant ainsi l'environnement utérin, le développement embryonnaire, donc le maintien de la gestation.


Conclusion


Remerciements

Les auteurs remercient Messieurs Gérard Baril de l’Institut national de recherche agronomique de Tours, France, et Jean-François Beckers de la Faculté de médecine vétérinaire de Liège, Belgique, pour leur contribution et collaboration permanentes.


Références

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Received 5 June 2019; Accepted 11 July 2019; Published 1 August 2019

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