Livestock Research for Rural Development 23 (12) 2011 Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

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Durabilite des systemes agropastoraux bovins dans le contexte semi aride des hautes plaines setifiennes (Algerie)

A Bir, H Yakhlef*, F Ghozlane, T Madani et M Marie

Département des Sciences, Université Ferhat Abbas, Sétif
biranour@yahoo.fr
ENSA, Département de Zootechnie, El- Harrach, Alger, Algérie
* URAFP, Nancy - Université, ENSAIA, B.P172, 54505 Vandoeuvre lès Nancy, France

Résumé

Cette  étude consiste à évaluer le niveau  de durabilité des exploitations agricoles laitières dans le contexte semi aride des hautes plaines Sétifiennes. Elle s'est déroulée entre Mars et  Mai 2007.  Elle repose sur un essai de transposition ou d’adaptation des indicateurs de la méthode IDEA (Indicateurs de Durabilité des Exploitations Agricoles). L’étude a été réalisée sur 48 exploitations réparties d’une manière homogène sur les trois zones bioclimatiques de la région (semi aride supérieur, semi aride central et semi aride inférieur).

L’analyse de la durabilité des exploitations laitières montre une grande diversité  de résultats  quels  que  soient  le type  d’exploitations,  la région ou la spécificité de production. 

 

Les résultats relatifs à l’évaluation de la durabilité permettent de mettre en évidence un niveau élevé pour la durabilité agro écologique, moyen pour la durabilité économique et faible pour la durabilité socio territoriale.  La méthode IDEA modifiée fournit une image globalement représentative de la durabilité de l'agriculture algérienne et pourrait donc servir à identifier les systèmes de production les plus "durables".

Mots clés: agriculture, développement durable, lait, Sétif



Sustainability of the agropastoral bovine systems in the semi arid area of setifian higher plains (Algeria)

Abstract

The study aims to estimate the level of sustainability of the dairy farms in the semi arid context of Setif. It took place between March and May 2007. It is based an trail of transposition or of adaptation of the IDEA method (farms sustainable indicators). The study was carried out on forty eight farms distributed in a homogeneous way on three bioclimatic areas (superior semi-arid, medium semi-arid and inferior semi-arid).
 

The analysis of sustainability of the dairy farms of the semi-arid area of Setif, shows a great diversity of results elsewhere the type of farms, the area or the specificity of production. The results related to the assessment of the sustainability make possible to highlight a high level for the agroecologic sustainability, medium for the economical sustainability and weak for the socioterritorial sustainability.  The modified IDEA method give a representative picture of the sustainability of Algerian agriculture and serves atoll to identify the most sustainable of farming systems. 

Keys words: agriculture, milk, Setif, sustainable development


Introduction

En Algérie, l’agriculture et particulièrement le secteur laitier constituent l’une des priorités des programmes de développement économique et social. Couvrir le déficit en protéines animales au niveau national sans augmenter l’importation tout en évitant l’apparition de problèmes intervenus en pays développés à l’aide de l’innovation technique visant l’amélioration des performances économiques et productives des troupeaux, consiste à fixer des objectifs qui prennent en compte une amélioration globale de ce secteur tant au niveau économique, social qu’environnemental. Pour atteindre ces objectifs, le concept de durabilité développé au  cours des deux dernières décennies et utilisant d’une manière intégrale les trois composantes du développement durable peut être une solution efficace tant au niveau de l’exploitation qu’au niveau des décideurs. Cette étude consiste à caractériser, en s’inspirant de la méthode IDEA (Vilain, 2003), l’intérêt de l’amélioration de la durabilité  de l’élevage bovin laitier en zone semi aride algérienne.


Matériels et méthodes

La méthode des indicateurs de durabilité des exploitations agricoles (IDEA) (Vilain et al. 2003) adaptée au contexte semi aride sétifien a été utilisée pour analyser, en s’appuyant sur des enquêtes, le caractère durable de 48 exploitations laitières. Deux grands types de modifications ont guidé la conception de la nouvelle grille d’évaluation de la durabilité. Le premier se rapporte aux précisions ou modifications réalisées (acceptation, modification ou rejet des variables et la pondération de chaque variable ou indicateur) avant le calcul des indicateurs. Le deuxième type concerne les bornes maximales qui ont été fixées de manière à ne pas dépasser le total plafonné pour chaque composante de durabilité.

 

Les données structurelles des exploitations (Surface Agricole Utile , irrigation, force de travail,  spéculations culturales, surfaces fourragères et effectifs des animaux) ayant servies à l’élaboration d’une analyse en composantes multiples suivie d’une classification hiérarchique ascendante (logiciel SPAD) sont constituées de 14 variables qualitatives actives divisées en différentes modalités. Pour mettre en évidence les principaux facteurs de variation de la durabilité en fonction de la typologie des exploitations, une analyse en composantes principales a été effectuée à l’aide d’une variable nominale illustrative (types d’exploitations) et 51 variables continues (41 variables traduisant les scores des 41 indicateurs, 10 variables traduisant les différentes composantes et échelles de durabilité ainsi que la durabilité agricole). La durabilité totale et les trois échelles de la durabilité ont été considérées comme variables actives et les autres variables continues comme illustratives.


Résultats et discussion

Caractéristiques des exploitations

 

La surface  agricole moyenne des exploitations enquêtées s’établit à 27,8 ± 17,6 ha dont 8,82 ± 7,30 ha sont conduits en irriguée  ce qui représente 31,6% de la SAU. Les céréales occupent en moyenne 14 ha soit 50,3% de la SAU. Les cultures fourragères sont présentes dans 98% des exploitations enquêtées  avec en moyenne une surface de 6,24 ha soit 22.3% de la SAU. Les éleveurs exploitent une ou plusieurs espèces de ruminants selon les possibilités qu’offrent les ressources alimentaires et les pratiques à l’échelle locale. En effet, 22% des unités exploitent les trois espèces (bovin, ovin et caprin), 58% n’ont que des bovins et des ovins alors que le bovin est exploité seul dans 22% des exploitations. Le troupeau bovin est composé en moyenne de 29 têtes dont 14 vaches laitières. 31% des exploitations possèdent un effectif de moins de 21 têtes de bovin alors que 33% exploitent des troupeaux bovins de taille relativement importante (>30 têtes). L’élevage ovin est pratiqué par 77% des unités et 59% d’entre elles exploitent moins de 100 têtes. Le caprin est rarement élevé et s’il existe, sa taille est réduite, moins de 10 têtes associées aux ovins.

 

Typologie des exploitations

 

L’analyse statistique a permis d’identifier quatre groupes d’exploitations (Figure 1) :



Figure 1. Les différents groupes typologiques identifiés dans la zone semi aride Sétifienne

Groupe 1:  Exploitations de petite taille à orientation élevage bovin  

 

Ce groupe  est constitué de 4 exploitations disposant d’une SAU moyenne de 11 ha dont 49% sont occupés par  la céréaliculture. Les cultures fourragères et maraîchères sont conduites en irriguée avec des surfaces relativement réduites. L’élevage bovin occupe la première place dans ce groupe avec environ 20 têtes  dont 50% de vaches laitières alors que l’élevage ovin est de taille moyenne (55 têtes).

 

Groupe 2: Exploitations de taille moyenne à orientation élevage bovin -céréaliculture  

 

Ce groupe comprend 15 exploitations qui se caractérisent par une SAU relativement moyenne (25,3 ha) où plusieurs spéculations culturales sont pratiquées. L’irrigation touche 26% de la SAU et les céréales occupent 13.3 ha soit 52% de la SAU ; elles sont suivies par les cultures fourragères et le maraîchage avec respectivement 4,75 et 2,66 ha. Dans ce groupe, le troupeau bovin s’établit à 32 têtes dont 16 vaches laitières en moyenne. Le troupeau ovin est de  taille moyenne avec 67 têtes en moyenne par exploitation. Enfin, 27% des exploitations de ce groupe pratique l’élevage caprin dont l’effectif varie entre 4 et 9 têtes.  

 

Groupe 3: Exploitations de grande taille à orientation céréaliculture - élevage bovin


Ce groupe est constitué de 17 exploitations avec une SAU moyenne de 32,2 ha dont 23%  en irriguée. La spéculation dominante est la céréaliculture qui occupe 56% de la SAU.  Les cultures fourragères et maraîchères occupent respectivement 15 et 7% de la SAU. L’effectif des  ovins et des bovins est respectivement de 27 et 23 têtes dont 54%  de vaches laitières.

 

Groupe 4: Exploitations de grande taille  à orientation  élevage - culture fourragères en irriguée  

 

Douze  exploitations  soit 25% de l’échantillon constituent ce groupe. La SAU moyenne s’établit à 33,2 ha dont 34% est réservée aux fourrages.  L’irrigation est pratiquée  à grande échelle avec en moyenne 15 ha de la SAU (45% de SAU). Elle concerne généralement les cultures  fourragères (34% de SAU), les cultures maraîchères (11% de SAU) et l’arboriculture (7,3% de SAU). La céréaliculture  occupe en moyenne   14 ha soit  39%  de SAU. Dans ce groupe, le bovin est associé à l’ovin avec une  taille moyenne respective de 38 têtes dont 19 vaches laitières et 152 têtes d’ovins.  

 

 Analyse des trois échelles de la durabilité

 

 Echelle de durabilité agro écologique

 

Les résultats de l’échelle agro écologique sont assez homogènes. Globalement, cette échelle présente les meilleures performances de durabilité pour les exploitations enquêtées. Ces résultats s’expliquent par une forte diversité végétale et animale, un faible usage des pesticides et des engrais, une faible dépendance énergétique et une meilleure gestion de la matière organique. Cette échelle  qui comprend les indicateurs allant de A1 à A19 atteint une valeur moyenne de 64% du maximum théorique pour l’ensemble des exploitations enquêtées. Cette valeur est légèrement inférieure à celles rapportées par Yakhlef et al  (2005) et Far (2007) pour la même zone avec respectivement 70 et 67,6%. Elle est par contre comparable à celle obtenue par Ghozlane et al (2006) pour la wilaya de Tizi Ouzou soit 65,5%. Cependant, elle est nettement supérieure à celles rapportées par Bekhouche (2004) et Benatellah (2007) pour la Mitidja avec respectivement 45,2 et 55,7%. L’analyse de la variance pour cette échelle n’indique aucune différence significative (P>0,05) entre les types d’exploitations (Tableau 1).


Tableau 1. Durabilité totale et des trois échelles (Moyennes et écart type)

 

Effectif

Agro écologique

Socio territoriale

économique

Durabilité totale

Groupes Typologiques

G1

4

  66,5±4,43a

  43,7±4,65a

  42,2±8,06a

   38,0±3,37a

G2

15

65,6±8,35a

50,8±6,54ab

52,6±9,88ab

47,7±8,61ab

G3

17

62,9±8,92a

52,3±5,78b

58,8±9,69b

50,6±6,55b

G4

12

62,8±10,0a

 49,8±6,13ab

 55,6±10,96ab

 46,7±7,42ab

Valeur maximale

100

100

100

100

Moyenne et écart type

64,0±6,10

50,3±3,97

54,4±7,26

47,9±5,46


 Echelle de durabilité socio territoriale 

 

Cette échelle qui regroupe les indicateurs de B1 à B16 enregistre un score moyen de 50,3% du maximum théorique. Ce score est de loin plus important que le score rapporté par Far (2007) pour la même région (22,7%). Il est également plus important que le score rapporté par Ghozlane et al  (2006)  pour la zone humide de Tizi Ouzou (36%) et les scores rapportés par Bekhouche (2004) et Benatellah (2007) pour la Mitidja avec respectivement 29,4 et 38,8%. Cette situation est influencée par la faiblesse des composantes qualité des produits et du territoire et emploi et services. Cependant, la  composante   éthique et développement humain et les indicateurs pérennité probable et contribution à l’équilibre alimentaire mondial présentent à eux seuls 24,4% du score de cette échelle. L’analyse de la variance révèle une différence significative (P<0,05) entre les types d’exploitations pour lesquelles les meilleures performances sont atteintes par les grandes exploitations (Tableau 1).

 

 Echelle de durabilité économique

 

L’échelle de durabilité économique est très hétérogène. Cette échelle qui comprend les indicateurs de C1 à C6 atteint une valeur moyenne de l’ordre de 54,4%. Elle est nettement plus importante que celles calculées d’une part, par Far (2007) pour la même zone (49%) et d’autre part, par Bekhouche (2007) pour la Mitidja (50,5%). L’analyse de la variance montre différence significative (P>0,05) entre les types d’exploitations. En fait les valeurs moyennes sont beaucoup plus élevées pour les grandes et moyennes exploitations   (Tableau 1).

 

 Durabilité totale

 

Les notations de la durabilité totale varient de 30 à 63 points avec une valeur moyenne de 47,9 points soit 47,9% du total théorique. La répartition des résultats (Figure 2) laisse apparaître l’existence de deux exploitations dont la durabilité est limitée par l’échelle agro écologique, 14 exploitations  dont la durabilité est limitée par l’échelle économique et enfin 32 exploitations dont la durabilité est limitée par l’échelle socio territoriale (Figure 2).  L’analyse de la variance montre une  différence significative entre les types d’exploitations avec des  moyennes  plus faibles pour les petites exploitations (Tableau 1).



Figure 2. Histogramme de la durabilité agricole

 Typologie des exploitations selon leur degré de durabilité

 

Une classification hiérarchique ascendante a permis d’identifier quatre classes de durabilité (Fig3 et tableau 2).

 

Classe A : Exploitations à durabilité faible (14 exploitations)

 

Cette classe se caractérise par les plus faibles scores aussi bien de durabilité agricole que pour les échelles socio territoriales et économiques. L’analyse de la variance révèle une différence hautement significative (P<0,01)  entre les classes avec des moyennes de durabilité totale et économique faibles pour la classe A comparativement aux autres aux autres classes. 


Tableau 2. les différentes échelles et composantes de durabilité

(Moyennes et écart types)

 

Classe A

Classe B

Classe C

Classe D

Durabilité totale

39,2±4,50a

41,0±6,68a

48,4±3,80b

56,2±2,9c

Agroécologique

63,1±5,67b

44,7±9,32a

64,4±6,20b

69,6±5,4c

Socio-territoriale

45,7±4,34a

45,0±1,41a

48,6±3,96a

57,6±3,15b

Economique

40,9±6,08a

55,5±8,35ab

59,8±4,52b

61,5±6,99b

Diversité

20,3±3,71ab

12,7±4,43a

20,7±4,70ab

24,2±2,65b

Organisation de l'espace

23,5±3,18a

17,0±4,97a

22,6±4,69a

23,0±4,80a

Pratiques agricoles

19,2±3,71ab

15,0±4,55a

21,0±2,48ab

22,4±2,61b

Qualité des produits

14,5±3,57 ab

11,5±1,73a

12,0±2,30a

17,2±2,54b

Emploi et services

12,9±2,06a

15,2±3,40ab

17,7±2,7 b

18,9±3,13b

Ethique

18,2±2,64a

18,2±3,20a

18,8±2,56a

21,5±2,07b



Figure 3. typologie des exploitations selon leur degré de durabilité

Classe B : Exploitations à durabilité économique moyenne -4 exploitations

 

Cette classe se caractérise par des niveaux de durabilité agricole, agro écologique et socio territoriale faibles par rapport aux classes C et D et un niveau relativement bon pour la durabilité économique. L’analyse de la variance montre une différence hautement significative (P<0,01) surtout pour l’échelle de durabilité agro écologique et ses composantes (diversité et pratiques agricoles) pour lesquelles elle présente les plus faibles scores.

 

Classe C : Exploitations à durabilité moyenne -15 exploitations

 

Cette classe se caractérisée par un niveau de durabilité totale très moyenne. Elle est corrélée positivement avec l’échelle socio territoriale et ses composantes (qualité des produits et du territoire, emploi et services et  éthique et développement humain). L’analyse de la variance montre une différence significative (P<0,05) par rapport aux autres classes.

 

Classe D : Exploitations à durabilité élevée -15 exploitations

 

Cette classe a le niveau de durabilité le plus élevé. L’analyse de la variance montre une différence hautement significative (P<0.01) par rapport aux autres classes quelles que soit l’échelle ou la composante de durabilité étudiée. Elle présente également une corrélation positive avec l’échelle socio territoriale.


Conclusion


Références

Bekhouche N 2004. Les indicateurs de durabilité des exploitations laitières en Algérie : Cas de la Mitidja. Thèse de Magister, INA El Harrach (Alger).  135p.

 

Benatellah A 2007. Evaluation de la durabilité des exploitations bovins laitières de la Mitidja. These Magister, INA,  El Harrah (Alger). 187p.

Far Z., 2007. Evaluation de la durabilité des systèmes agropastoraux bovins dans le contexte de la zone semi aride de Sétif (Algérie). Thèse magister, INA El Harrach (Alger).  118p.  http://hpthese.ina.dz:8070/sdx/ina/ina/2007/far_z

 

Ghozlane F, Yakhlef H, Allane M et Bouzida S 2006. Evaluation de la durabilité des exploitations bovines laitières de la wilaya de Tizi Ouzou (Algérie). New Medit 2006 ;4 : pp 48-52. . 151p. http://www.iamb.it/iamb2005/programmi/webcreate.php?id=31&idarea=5

 

Vilain L 2003. La méthode IDEA : indicateurs de durabilité des exploitations agricoles. Guide d’utilisation, deuxième édition enrichie et élargie à l’arboriculture, au maraîchage et à l’horticulture.  Educagri Editions,  Dijon. 151p.

 

Yakhlef H, Ghozlane F, Bir A et Benidir M 2005. Essai d’application de la méthode des indicateurs de la durabilité des exploitations agricoles (IDEA) dans le contexte de l’élevage bovin laitier de la zone semi aride de Sétif (Algérie). Annales de l’institut Agronomique El Harrach (Alger). 26 N°1 et 2, pp 95-109. http://hpthese.ina.dz/annales/2005/ia00p550/pdfAmont/ia00p550.pdf


Received 13 October 2011; Accepted 12 November 2011; Published 2 December 2011

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